Responsable des U15 R1 depuis deux saisons, Ghislain Correa est l’un des rouages les plus importants du SC Balma. Il s’occupera désormais de la catégorie U16 R1. Ce club réputé pour repérer et former de futurs talents a été touché de plein fouet par l’arrêt des championnats des jeunes. L’éducateur nous parle des conséquences de la crise sanitaire et reste optimiste quant au redémarrage de la formation et l’encadrement des enfants dont le club a la charge.
Avez-vous pu remobiliser les effectifs depuis la reprise des entraînements ?
Quand les entraînements ont repris, nous avons eu la chance d’avoir plus d’une trentaine de joueurs présents aux séances. Même pour du sans contact, les jeunes sont au rendez-vous et volontaires. Il faut tenter de les maintenir dans le bain malgré les circonstances, et ça a l’air de plaire.
Comment s’est passée cette période d’arrêt quasi-total ?
A Balma nous n’avons pas fait énormément d’entretien physique parce que déjà à l’époque nous étions sûrs que les championnats ne reprendraient pas. A titre personnel j’ai proposé du renforcement technique pour ceux qui voulaient. Et l’important c’était surtout de garder un lien avec eux. Evidemment, les city stades ont beaucoup été utilisés à droite à gauche pour pallier le manque d’entraînements au moment le plus fort des confinements. Ce n’était pas autorisé, mais tout le monde se doute qu’un jeune ne peut pas se couper de toute activité du jour au lendemain. Ils se sont organisés d’eux-mêmes.
Les jeunes ont-ils souffert psychologiquement ?
J’ai l’impression qu’ils ont réussi à garder le moral au final. C’est vrai que nous avons de très bonnes relations avec eux, mais vous connaissez les jeunes : ils sont nombreux à garder le sourire et ne pas vouloir montrer quand ça ne va pas bien. Alors c’est assez compliqué de savoir exactement ce que chacun pense. Nous espérons que le peu qu’on a pu leur offrir leur a donné du plaisir. Il faut que chacun prenne conscience que cette saison blanche a servi simplement à préparer la prochaine parce que la compétition reprendra fort. L’important est de voir qu’ils sont contents de se revoir et de nous revoir.
Les jeunes Balmanais sont déjà remobilisés (crédits : BSC)
Sont-ils toujours motivés ?
Nous avons la chance d’avoir des gamins engagés dans un projet qui vise le haut niveau. Tout le monde n’y arrivera pas bien entendu, mais si au bout de 6 mois de difficulté ils ne sont plus motivés pour cet objectif, alors ils se sont trompés d’ambition. Oui ils sont tous motivés à reprendre la compétition chez nous. Je sais qu’ailleurs, les protocoles ont fait que l’engagement des gamins a clairement chuté. C’est triste.
Y a-t-il eu des départs de licenciés ?
C’est à l’école de foot qu’on a connu une baisse de licence : clairement si on enlève le plaisir de la pratique du foot loisir, il n’y a plus de raison de continuer. Quand un U15 veut tenter d’intégrer un club pro, il reste assidu, quand il veut juste s’amuser, je comprends qu’il ait les jambes coupées. Et pour les parents, c’est dur de payer une licence pour ne faire qu’un tiers de saison pour rien.
Peut-on parler de génération sacrifiée ?
Chez les grands ados, les équipes R1 et Nationale ont connu une grande frustration. L’objectif à leur âge est de se classer le mieux possible au sommet de leur catégorie. Là ça a été balayé et ça les a grandement peinés. Alors très vite il a fallu dire aux U17 de faire le deuil de leur année pour leur assurer que s’ils s’appliquaient en U18 cette année, ils auront leur chance en U19. Pour les 18, il a fallu les concerner sur les entraînements avec les séniors et certains vont intégrer le groupe N3. Mais oui il y en a beaucoup qui voient leurs belles années foot leur passer sous le nez. Mentalement, on ne sait pas encore à quoi s’attendre de leur part.
“Nos jeunes ont moins de points de chute”
Des rêves de carrière ont-ils pu tomber à l’eau ?
Nous ne sommes que Balma, nous n’avons pas 4 pros potentiels chaque année. Mais oui beaucoup d’essais ont été reportés, les clubs pros ont eu très peu d’éléments pour les juger en compétition, les joueurs ont tout simplement infiniment moins de visibilité que lors d’une saison normale. Ajoutez à cela les problèmes actuels de certains clubs, nos jeunes ont moins de points de chute. L’effet pervers de la situation c’est que des gens moins bien intentionnés rodent et cherchent à faire signer des jeunes sans nous mettre au courant. Heureusement la grande majorité des familles joue le jeu avec nous mais certains jeunes, quand ils sont contactés par des agents louches sur Instagram pour leur faire miroiter des essais dans je ne sais quel club, voient là leur seule opportunité de la saison.
Vous ne pouvez pas toujours être derrière vos joueurs…
Les parents s’inquiètent quand leur enfant a ce genre de proposition et ils ont raison. Donc ils nous contactent et nous les conseillons. Mais dans la période actuelle, c’est difficile d’être vigilants là-dessus. Après nous avons choisi de ne rien imposer à nos jeunes, mais il y a des manières de faire et quand un agent prend d’abord contact avec les familles des joueurs et jamais avec les éducateurs, c’est qu’il y a un loup.
Combien de temps faudra-t-il pour retrouver le niveau de chacun avant la crise ?
Le niveau c’est toujours relatif. Par chance, tout le monde a été ramené vers le bas à cause de l’arrêt général. Tout le monde aura des lacunes. Les clubs qui seront le moins pénalisés seront ceux qui ont le mieux travaillé et fidélisé leurs gamins. Nous avons tout fait pour être parmi ceux-là. Nous avons aussi très tôt fixé notre organigramme de la saison prochaine et ça a de quoi rassurer les joueurs.
