Grand angle

Médias – Daniel Riolo se confie à Footpy !

Éditorialiste de l’émission quotidienne sur RMC « l’After Foot », Daniel Riolo a sorti un nouveau livre en septembre « Mon cher football français » aux éditions Hugo Sport, tirant sur la sonnette d’alarme. Pour Footpy, le journaliste nous a accordé une interview cette semaine, en visio, pour parler de l’état de foot français, mais aussi du TFC. Entretien.

 

“Bonjour Daniel, merci de nous accorder un peu de temps. Comment vous est venue l’idée d’écrire ce livre ?

Je ne sais pas exactement si c’était l’envie de faire un bilan mélangé à un règlement de compte avec mon football, celui que je suis au quotidien et qu’on suit tous ! Le foot français, notre Ligue 1, me désole depuis des années. Le déclic vient de ce livre : « Mon cher cinéma français » du journaliste du Figaro Eric Neuhoff qui règle ses comptes avec le cinéma français à travers un pamphlet et j’ai trouvé que de le faire avec le football français c’était une bonne idée. Je voulais faire un pamphlet assez court d’une centaine de pages puis finalement j’ai écrit d’autres histoires et des anecdotes très personnelles et c’est devenu un livre un peu plus important. Je me suis arrêté avec le confinement du printemps dernier, j’ai pensé à ne pas le sortir parce que ça ne correspondait pas avec la situation, puis j’ai repris tellement il y a eu d’erreurs de faites dans notre football. J’avais la sensation qu’on me poussait à y aller finalement tellement les dirigeants ont été lamentables à ce moment là.

 

Dans votre livre, sorti en septembre 2020, vous imaginiez déjà l’échec de Mediapro. Aujourd’hui, avec les droits laissés par le groupe sino-espagnol et le nouvel appel d’offre qui prend du temps, pensez-vous que la situation du foot français est encore pire que lorsque vous écriviez votre livre ?

On savait que ça n’allait pas coller avec Mediapro, ce n’était pas possible avec ce modèle proposé, il était évident que la situation allait s’empirer. C’était difficile à envisager et à quantifier dans toute son ampleur mais finalement ces conséquences sont logiques. Aujourd’hui on en est à recoller les morceaux. Combien d’argent va rentrer dans les caisses des clubs, si ça rentre ? La boulette est tellement énorme qu’elle ne peut pas être réparée. L’objectif est d’obtenir au moins la moitié du milliard promis, ça serait déjà bien, surtout qu’il faudra rembourser les prêts qui ont été consentis… Malheureusement on n’est pas au bout des histoires et des problèmes surtout. Il faudra faire les comptes en fin de saison voir si les clubs pourront recruter. Mais ça peut être une chance pour les clubs français, ils vont peut-être garder leurs bons joueurs, ne pas les vendre et les clubs ne perdront pas leurs forces vives.

 

     “Le foot amateur souffre !”

 

L’Espagne s’est remis dans le bon chemin en revoyant tout son système après la crise économique qui a touchée tout le pays en 2008 mais qui correspond aussi avec le début de l’hégémonie ibérique que ce soit avec ses clubs et son équipe nationale… Le football français peut-il prendre exemple sur son voisin espagnol ?

Éventuellement… si on est assez intelligents pour tirer profit du malheur, si on envisage le foot autrement, c’est à dire par le jeu pour commencer. Mettre en place un autre système économique qui ne repose pas uniquement sur les droits télé et la vente des joueurs. Mais je suis assez pessimiste parce qu’aujourd’hui il n’y a personne dans les stades. Est-ce que les gens vont revenir ou est-ce que ça va les éloigner ? Il y aura le plaisir de revenir mais ça ne compensera pas le manque de niveau. La ligue 1 va se replier sur elle même mais elle peut proposer un championnat plus attractif finalement si les joueurs n’ont plus la seule idée en tête de partir, ils pourront s’imaginer dans un projet collectif. Mais j’ai peur que ce soit un peu illusoire tout ça… il faudrait des projets forts dans les clubs, mais aujourd’hui il y en a très peu.

 

Daniel Riolo répond aux questions de notre journaliste en visio.

 

Dans le livre, vous évoquez aussi le monde amateur qui est aussi en danger…

Le monde amateur souffre également puisque le foot pro reverse beaucoup d’argent au monde amateur. Et sans cette manne financière, c’est tout le football dans son ensemble qui souffre. Les clubs, en plus, ne peuvent pas s’entrainer ou s’entrainent mal. On essaie de jouer la Coupe de France mais certains clubs ne peuvent pas. Le foot amateur va morfler également.

 

Vous soulignez, que ce soit dans l’émission l’After Foot sur RMC ou dans votre livre, les problèmes du foot français, vous proposez aussi des solutions. Pourquoi est-ce que vous ne vous investissez pas dans un club ou dans les instances ?

Mais pourquoi est-ce que je le ferais ? On a trop reproché à des journalistes d’être recrutés par des clubs et ne pas réussir ensuite. Chacun son métier. C’est un métier journaliste, je raconte ce qu’il se passe, j’observe, je révèle des choses mais pourquoi j’irais m’investir là dedans ? Si un club de Ligue 1 me le proposerait, je ne pense pas que j’aurais envie d’y aller. Je suis très heureux de ce que je fais aujourd’hui. On ne demande pas aux journalistes politiques de faire de la politique ou aux journalistes critiques de cinéma de faire des films. Certains l’ont fait c’est vrai comme François Truffaut par exemple mais je n’en ai pas l’envie. En revanche, je l’ai déjà dit plein de fois dans l’After, si un gars dans un club me demande des conseils parce qu’il aime bien ce que je dis, j’irais échanger avec lui pour transmettre mes idées mais gratuitement. Je veux bien qu’on me demande mais aller m’impliquer et changer de métier, non. Je ne rêve pas de ça. Ministre des sports à la limite (rires).

 

Vous déplorez dans « Mon cher football français » que le foot reste le sport d’en bas et qu’il est très peu théorisé, comment vous expliquez ça ?

Historiquement, ça s’est toujours passé comme ça en France, on a du mal à vouloir réfléchir en chassant ceux qui réfléchissent aux maux du football pour laisser la place aux praticiens uniquement. On me renvoie toujours à la tronche : « Tu n’as jamais été sur le terrain, tu ne peux pas en parler ». J’essaie de montrer que ce n’est pas vrai. Certains l’ont montré en devenant de très bons entraineurs sans avoir été des joueurs pro avant. C’est bien la preuve que l’on peut le faire. A l’inverse, il y a de très grands joueurs qui sont devenus de très mauvais entraineurs. D’autres ont réussi comme Zinedine Zidane ou Carlo Ancelotti. Il y a de tout dans le football. Je n’ai pas envie de donner de leçons à ceux qui sont sur le terrain. Oui je citrique mais je critique aussi bien positivement que négativement. On est libre de me lire, de m’écouter ou pas, si on estime que je dis des bêtises.

 

     “Christophe Pélissier est hors clous !”

 

Vous avez travaillé à RMC avec Luis Fernandez. Vous avez aussi écrit sa biographie « Luis contre-attaque » aux éditions Hugo&Cie. L’ancien milieu de l’équipe de France vous appelle « l’intello du football »…

Luis dit ça parce que j’ai quelques idées, mais je n’ai pas inventé le vaccin contre la Covid non plus. Malheureusement d’ailleurs. Je ne veux pas qu’il y ait de barrière entre ceux qui pensent et ceux qui font. Le soir je parle beaucoup dans mon émission, je critique autant, je m’énerve aussi parfois et je peux donner l’impression de vouloir imposer mes idées, ce qui peut être vrai. Mais la journée je suis plutôt du genre à écouter pour me faire un avis. Souvent, j’ai Luis au téléphone pour lui demander son avis. Sur un joueur, sur une équipe… Et ça je le fais avec plein de gens, pour confronter mes idées avant de construire. Je n’arrive pas le soir à la radio en me disant, je vais dire que ça, ça me plait et que ça, ça ne me plait pas. Je réfléchis toujours à ce que je vais dire.

 

Vous parliez tout à l’heure des entraineurs qui n’ont pas été joueurs professionnels. Il y a très peu de cas en France, vous le soulignez dans votre livre. Cela doit-il changer ?

Ça change déjà un peu, on essaie de faire évoluer ça. Ce n’est pas gagné. Le seul qui est vraiment hors clous dans notre football français c’est Christophe Pélissier à Lorient. Il a eu des résultats excellents avec Luzenac, Amiens et même Lorient qu’il a fait monter en ligue 1 même si là ça ne se passe pas très bien. Son bilan est positif. Mais la façon dont est construite l’accession à la carrière d’entraineur en France n’est pas évidente au contraire des portugais qui eux se revendiquent être des intellectuels du foot. José Mourinho, Leonardo Jardim et plein d’autres n’ont pas été des joueurs de foot avant, c’est ouvert à tous. En Italie aussi, même si les praticiens veulent garder leur football à eux, on a vu Arrigo Sacchi faire une grande carrière, Maurizio Sarri aussi a fait de belles choses, à Naples notamment. Chez nous c’est plus compliqué.

 

Suivez-vous les résultats du TFC en Ligue 2 ?

Pas beaucoup mais j’avoue que ces dernières semaines, leur grosse remontée et leur façon de jouer, plait à pas mal de gens et c’est agréable. La façon dont ils ont recruté beaucoup de joueurs est originale avec la « méthode Commoli ». D’ailleurs, Damien Commoli, c’est le gars qui n’a jamais connu le terrain. Il a tout appris sur le tas, il n’a jamais été joueur de haut niveau. Il a des méthodes, qu’on aime ou pas, toujours est-il qu’il a connu pas mal de réussite dans ce domaine. À Liverpool, à Tottenham, il a fait de grandes choses et à Toulouse ça a l’air de bien fonctionner. Je vais suivre ça de près, ça peut être intéressant.

 

La méthode Commoli justement, qui consiste à chercher des joueurs par rapport à des « Data » comme le jeu « Football Manager » mais aussi à bien se renseigner sur le coté humain du joueur, ça vous plait ?

 Je savais que ça existait et je trouve que c’est très bien. À Brest aussi, le directeur sportif Grégory Lorenzi étudie de près toutes les personnalités pour façonner son groupe et l’image que va donner son équipe. C’est très intéressant de ne pas s’attarder que sur la qualité footballistique mais aussi sur la façon dont le joueur va pouvoir se développer à l’intérieur d’un collectif. C’est très intelligent.”

"Cher football français"

“Cher football français” aux éditions Hugo Sport

 

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